L’OFAJ, partenaire officiel de la Berlinale, ainsi que de la section Perspektive Deutsches Kino, invitèrent à un débat sur l’égalité hommes-femmes dans le monde du cinéma dans le cadre de la 65e édition du festival.

Julie Gayet, actrice, productrice et réalisatrice française, Axelle Ropert, journaliste, critique cinéma, scénariste et réalisatrice, Claudia Tronnier, journaliste (ZDF) et la réalisatrice Tatjana Turanskyj, ainsi que Annekatrin Hendel, productrice et réalisatrice, ont débattu devant une salle comble du sujet « La place des femmes dans le cinéma. Faut-il introduire des quotas ? ». Elles ont démontré la complexité de la question des quotas dans le monde du cinéma, mais surtout à quel point cette question fait débat.

Le documentaire « Cinéast(e)s », réalisé par Mathieu Busson et Julie Gayet, a inauguré l’évènement, suivi par le discours de bienvenue de Linda Söffker, directrice de la section Perspektive Deutsches Kino, ainsi que des Secrétaires généraux de l’OFAJ Béatrice Angrand et Markus Ingenlath. Une vingtaine de cinéastes françaises ont ainsi pris la parole et ont cherché à comprendre ce qu’était réellement « un film de femmes », c’est-à-dire un film réalisé par une femme. Un bon point de départ pour le débat qui a suivi, animé par Frédéric Jaeger, rédacteur en chef de critic.de.

La discussion s’est révélée passionnante, les invitées étant toutes plus différentes les unes des autres. « En Allemagne, nous avons 42% de diplômées, mais seulement 11% de réalisatrices sur les chaînes publiques », a justifié Tatjana Turanskyj, du collectif de réalisatrices ProQuote Regie, dans son plaidoyer en faveur de la mise en place de quotas, qui faciliterait l’emploi des femmes dans le domaine de la réalisation. Pour la productrice Annekatrin Hendel, seule prime la qualité de l’histoire, et non le sexe. Elle a déclaré : « Cette discussion quant aux quotas est intéressante, mais pour moi, la vraie question est : quelles en seront les conséquences ? Personnellement, je n’ai pas le temps d’y penser ».

Quant à savoir si instaurer des quotas ne serait « pas sexy », une cinéaste du public a répondu que cela aurait « l’élégance d’un pied-de-biche ». Cependant, la méthode forte serait parfois la bonne et permettrait d’imposer des revendications économiques et politiques majeures. Pour Julie Gayet, cette différence est intrinsèque au milieu : il serait plus difficile, du moins en France, de parler de quotas dans le milieu artistique, qu’en politique par exemple, car le problème est plus la répartition des subventions que le salaire. Pour instaurer des quotas dans l’industrie cinématographique, il faudrait ainsi adopter une autre approche.

Au cours du débat, les esprits se sont échauffés et les invités ont eu des échanges animés. Au sein du public, chacun semblait avoir son avis sur les quotas; des protestations se sont élevées des rangs du fond, alors que la réalisatrice Axelle Ropert a énoncé la thèse controversée selon laquelle le cinéma serait un monde majoritairement blanc et masculin, donc non enclin aux représentations féministes. Annekatrin Hendel a également provoqué de vives réactions alors qu’elle maintenait le fait qu’introduire des quotas serait sans doute néfaste pour le milieu.

Les différences entre les industries cinématographiques allemande et française ont été abordées par la suite, ainsi que le sujet de la garde d’enfants.

Cette discussion sur l’égalité a été centrale au cours du festival cette année, ce qui représente un problème aux yeux de certaines critiques : « Si l’on m’affirmait avant le festival que pour la deuxième fois un film de femme serait programmé lors de l’inauguration, je ne le regarderais pas de la même façon », a déclaré Annekatrin Hendel. Elle faisait alors référence au film « Nobody wants the Night » de la réalisatrice Isabel Coixet, qui avait déjà évoqué la question des quotas lors de la soirée d’inauguration.

Le monde du cinéma pourra t-il un jour atteindre une situation idéale avec l’instauration de quotas ? La question a divisé le podium. Toutes se sont cependant accordées sur le fait que plus d’études devaient être menées sur l’attribution de subventions.